Astérios Polyp
Auteurs   Mazzucchelli, David (Auteur)
Edition  Casterman (Editions) : Paris , 2010
Collection   Auteurs
Collation   344p
Illustration   ill. en coul.
ISBN   2-203-02977-3
Prix   29.95
Langue d'édition   français
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Plan d Orgon 1020351307619 BDA MAZ Adulte / Disponible
Notes : David Mazzucchelli signe avec Asterios Polyp un retour fracassant à la bande dessinée à travers un récit de vie qui subjugue autant par son propos que par son traitement narratif et graphique. Attention, chef-d’œuvre ! Certes, voilà un mot trop souvent galvaudé et de nature à faire naître une méfiance bien compréhensible chez le lecteur... Et pourtant, dans le cas d’Asterios Polyp, il ne semble pas souffrir la contestation. Cet album marque le grand retour à la BD de David Mazzucchelli, auteur de titres majeurs comme Big Man ou Cité de verre, adaptation remarquée du roman de Paul Auster. Venu au 9e Art par l’intermédiaire des comics de super-héros – on lui doit notamment une très belle version de Batman écrite par Frank Miller -, il s’orientera au bout de quelques années vers des récits à la tonalité plus littéraire tout en poursuivant une carrière d’enseignant de bande dessinée. Dans Asterios Polyp, il raconte le destin contrarié d’un professeur d’architecture considéré par tous comme brillant, mais qui n’aura jamais rien construit de sa vie – un architecte de papier , en quelque sorte, renommé pour la qualité intellectuelle de ses plans mais dont aucun n’aura donné le jour à une véritable construction. Volontiers cassant vis-à-vis de ses contemporains, imbu de sa personne et persuadé d’avoir toujours raison, Asterios Polyp fête d’une triste manière ses cinquante ans : le jour de son anniversaire, son appartement et tous les souvenirs qu’il contient sont détruits par un incendie. Il décide alors de réunir les quelques dollars qu’il a pu sauver du désastre pour prendre le bus et partir au hasard, avant d’échouer dans une petite ville où il s’improvise mécanicien. Puis il repartira sur les routes, non sans avoir radicalement changé dans le regard qu’il porte sur ses semblables et dans son rapport à l’autre. En soi, la destinée d’Asterios n’a rien d’exceptionnel. Cette histoire pourrait n’être rien d’autre qu’un récit de vie de plus, au terme duquel le personnage principal se défait de ses préjugés et de son complexe de supériorité pour s’humaniser et s’ouvrir à ses contemporains. Mais, outre la sympathie que l’on éprouve pour Asterios et pour les autres protagonistes de cet album, c’est le traitement narratif et graphique de Mazzucchelli qui nous fascine et qui fait d’Asterios Polyp une bande dessinée singulière, dont on peut prédire qu’elle remportera de nombreux Prix dans les mois qui viennent. Mazzucchelli joue en orfèvre de toutes les potentialités du langage de la bande dessinée. Le récit est mené du point de vue d’Ignazio, le frère jumeau d’Asterios mort à la naissance. Il enchaîne avec le plus grand naturel les flashbacks, usant de couleurs différenciées pour distinguer les différentes époques de l’histoire, se débarrassant de la contrainte formelle de la case et du cadre de la planche pour construire sa narration en toute liberté, multipliant les solutions graphiques comme autant d’astuces pour mettre en scène la variété de situations proposées. Mais cette grande richesse graphique - et c’est là tout le talent de Mazzucchelli - n’apparaît jamais comme purement gratuite et esthétisante : au contraire, elle n’est là que pour servir le processus de narration et guider le lecteur à travers les méandres du récit. Asterios Polyp ne relève ni de l’expérimentation ni de l’effet facile : cette bande dessinée reste avant tout captivante par sa matière humaine, par le destin singulier d’un homme qui se débarrasse peu à peu de ses vieux oripeaux pour renaître à la vie et porter un regard neuf sur son entourage. Et puis, ce qui ne gâte rien, le livre est un objet somptueux. Un véritable festival de couleurs et de lettrages qui enchantent l’œil, servi dans un superbe écrin qui en fait un authentique beau livre à ranger sur une étagère pour mieux le caresser du regard avant de le relire, comme il nous y invite par la richesse de son propos et de son traitement. Bref, un authentique chef-d’œuvre…
Sources : Babelthèque